Quand on s’appelle Sauveur, comment ne pas se sentir prédisposé à sauver le monde entier ?
Sauveur Saint-Yves, 1,90 mètre pour 80 kg de muscles, voudrait tirer d’affaire Margaux Carré, 14 ans, qui se taillade les bras, Ella Kuypens, 12 ans, qui s’évanouit de frayeur devant sa prof de latin, Cyrille Courtois, 9 ans, qui fait encore pipi au lit, Gabin Poupard, 16 ans, qui joue toute la nuit à World of Warcraft et ne va plus en cours le matin, les trois soeurs Augagneur, 5, 14 et 16 ans, dont la mère vient de se remettre en ménage avec une jeune femme… Sauveur Saint-Yves est psychologue clinicien. Mais à toujours s’occuper des problèmes des autres, Sauveur oublie le sien. Pourquoi ne peut-il pas parler à son fils Lazare, 8 ans, de sa maman morte dans un |
accident ? Pourquoi ne lui a-t-il jamais montré la photo de son mariage ? Et pourquoi y a-t-il un hamster sur la couverture ?
Voilà un petit moment que ce livre fait le tour de la blogosphère et je ne m’étais jamais arrêtée dessus. Pourtant, ce cochon d’Inde et ce titre, qui ne laisse rien transparaître au premier abord, avaient piqué mon intérêt à de nombreuses reprises. Ça me faisait le même effet que les couvertures de chats de Gilles Legardinier (et ça marche, parce qu’on est plutôt dans le même registre). En commençant ma lecture, je ne m’attendais pas à autant accrocher. Et à dire vrai, ça va même au-delà. Ce premier tome n’est pas passé loin du coup de cœur !
Sauveur & fils, c’est l’histoire d’un psychologue clinicien, Sauveur Saint-Yves, qui reçoit des enfants et des adolescents en consultation et tente de les aider à surmonter leurs problèmes du quotidien.
Sauveur & fils, c’est aussi l’histoire d’un père seul qui élève un petit Lazare de 8 ans à l’esprit vif et un brin trop curieux.
Sauveur & fils, c’est enfin l’histoire d’un homme aux racines antillaises, qui délaisse un passé mystérieux, mais bien décidé à le rattraper.
Le ton est donné. Ce premier tome est une superposition d’intrigues, avec des personnages dont les histoires s’entrecroisent de la plus habile des manières. À ma très grande surprise, moi qui traversais un véritable désert littéraire, je me suis prise d’affection pour tous ces personnages. Je suis même un peu tombée amoureuse de Sauveur, qui est sans nul doute l’un des protagonistes les plus remarquables que j’ai pu croiser dans une fiction.
Dans ce roman, Marie-Aude Murail déploie des trésors d’inventivité et met en avant des sujets d’actualité pas toujours joyeux – voire même carrément tabous : la scarification, le racisme, le deuil, le divorce ou encore la dépression. Des thèmes forts, dans lesquels on peut aisément se retrouver.
– Ce serait bien si la société n’avait pas plus de préjugés qu’une enfant de 5 ans, remarqua Sauveur, regardant la fillette.
– Malheureusement, dès 14 ans , ça se gâte, répliqua Charlotte.
Le plus inattendu là-dedans, c’est que malgré la noirceur de ces sujets, le texte reste dans la lumière.Il donne la foi, il arrive à nous tirer des gloussements et des sourires aussi attendris qu’amusés. Dans un tour de force remarquable, Marie-Aude Murail fait naître en nous des sentiments positifs, doux et ça fait du bien. Du feel good comme je l’aime !
— J’ai fini mon dessin ! annonça joyeusement Élodie.
— Viens nous le montrer, l’invita Saint-Yves.
Elle avait dessiné six bonshommes.
— Tu nous expliques ?
— Oui. Alors là, c’est papa avec moi, dit-elle en désignant un grand et un petit bonhomme se donnant la main. Mylène est partie faire du skate.
— D’accord.
— Là, c’est maman et sa copine.
Un grand et un petit bonhomme se donnaient la main, semblable au couple précédent.
— D’accord.
— Et là, c’est Lucie, conclut la petite en désignant un bonhomme à longs cheveux jaunes.
— Et alors moi, j’existe pas ? se récria Marion, réellement outrée.
— Oups, fit la petite qui courut avec sa feuille vers la table à dessiner.
Elle revint bientôt, triomphante, ayant ajouté un carré avec des boutons.
— C’est moi, ça ? s’étonna Marion.
— C’est ton téléphone. Tu es derrière.
En résumé, j’ai refermé ce roman en me sentant flattée (oui, flattée !) que l’auteure ait accepté de partager cette histoire avec moi. J’ai profondément aimé tous ces personnages, j’ai eu l’impression de faire un peu partie de leur histoire et de partager leurs maux. Après une lecture pareille, on a envie de chanter et d’embrasser tout le monde ! |
VOIR AUSSI :