Samantha Kingstone a tout pour elle : le petit copain le plus craquant du monde, trois meilleures amies géniales, et une cote de popularité illimitée. Ce vendredi de février aurait donc dû être un jour parfait dans une vie parfaite. Pourtant ce vendredi de février est le dernier pour Sam. Ou le premier ?
|
Je remercie les éditions Hachette ainsi que Myriam pour leur confiance. Des histoires où le héros revit chaque fois la même journée, ce n’est pas ce que l’on peut appeler l’idée du siècle. Il existe beaucoup de livres, de films et de séries télévisées qui traitent du sujet. Et pourtant, il y avait chez Before I fall quelque chose qui m’attirait, inexplicablement. D’habitude, je n’aime pas beaucoup les couvertures qui raccordent avec l’adaptation cinématographique, mais ce titre fait exception à la règle : il y a sur cette image une certaine mélancolie que l’on retrouve aussi dans l’histoire. Et que dire d’autre, si ce n’est que le contenu est encore meilleur ?
Sam est une lycéenne tout ce qu’il y a de plus normale. Elle fait partie de l’élite. Elle sort avec l’un des plus beaux garçons de l’école et a pour meilleures amies les personnes les plus populaires de l’école. Tout le monde l’envie, tout le monde aimerait être à sa place, et elle savoure cette célébrité avec délectation. Seulement un soir, alors qu’elle rentre d’une soirée avec ses amies, leur voiture fait une embardée et… c’est la fin. Sauf qu’au lieu de mourir pour de bon, Sam se met à revivre inlassablement la même journée. Comment est-ce possible ? Et comment cet accident a-t-il pu survenir ? Au travers de journées aussi éphémères qu’illusoires, la jeune fille va essayer d’en démêler les raisons.
Il faut savoir qu’en commençant ce livre, j’ai pris peur. Le genre de peur qui m’a poussé à me dire : « Ce livre n’est pas fait pour moi, je sens la déception arriver ». Et puis maintenant que je l’ai terminé, maintenant que je sais ce qu’il renferme, je suis tentée de me traiter de tous les noms, car si j’avais abandonné dès le début, je serais passée à côté d’une sacrée pépite !
Force est d’admettre que Lauren Oliver a pris un risque considérable. Elle met un temps fou à développer son idée. Le temps de 80 pages, on découvre la journée assommante de Samantha. Ce n'est pas non plus inintéressant, mais cette profusion de détails me semblait sans intérêt. Je me suis demandé à plusieurs reprises où tout ça allait m’amener. Pourtant, ces instants ont une réelle importance par la suite, et avec un peu de recul, je me dis que c’est de cette manière qu’il fallait imbriquer les choses et pas autrement.
Et si je vous dis que tout ça est fait exprès pour nous préparer à ce qui nous attend, vous me croyez ? Parce que Lauren Oliver ne s’est pas amusé à nous décrire une anti-héroïne pour le simple plaisir d’entretenir les clichés. Il y a un véritable fil conducteur dans l’intrigue. Lauren Oliver va en profondeur, elle creuse cette vie que mènent les lycéens, n'hésitant pas à aborder des sujets brûlants comme le harcèlement.
Car en ce moment, le harcèlement au lycée est au coeur de tout. On en parle un peu partout depuis la sortie et le succès retentissant de « 13 reasons why », l'adaptation en série du livre 13 raisons de Jay Asher. C'est un sujet qui a fait beaucoup réagir sur la toile, et Before I Fall est dans la même lignée, le côté boucle temporelle en plus.
Sam n’est pas vraiment ce que l’on pourrait appeler une Mère Teresa. Superficielle et orgueilleuse, j'avais envie de la secouer un nombre incalculable de fois, je ne vous raconte pas ! C'est typiquement le genre de personne populaire qui croit être le centre même de l'univers. Tout est là pour nous faire lever les yeux au ciel, pour la rendre non pas agaçante, mais proprement imbuvable.
Ses amies ne sont pas mieux, si ce n’est pire. Elles ne voient pas plus loin que le bout de leur nez. Ceux qui n'entrent pas dans le moule ? Des bizarres. Ceux qui ne pensent pas comme elles ? Des cas sociaux. Tout ne tient qu'à l'apparence et du nombre de roses que l'on reçoit à la Saint Valentin. C’est un petit monde étriqué que Lauren Oliver nous décrit. Un monde qui ne va pas tarder à basculer.
Peu à peu, sans qu'on ne le voie vraiment venir, la tendance s'inverse et on a la sensation que Sam dérive, totalement ballottée par ces journées identiques, cette boucle temporelle dont elle est prisonnière. L'agacement laisse tour à tour place à la pitié et à l’espoir.
Ces journées qui recommencent obligent Sam à grandir, à se remettre en question. Les choses qui lui semblaient indispensables perdent de leur importance, au profit de vraies valeurs. Sam se teste, elle fait des choses folles, des choses que la morale nous empêche de réaliser. Pourquoi ? Parce qu'elle le peut, tout simplement. Elle peut se permettre de faire le pire et même le meilleur. Parce que quoi qu'il arrive, là journée se répétera et elle devra tout reprendre à zéro. La seule chez qui il n'y aura pas de touche « reset », c'est Sam. C'est elle qui va changer et c’est elle qui est aux commandes de sa vie. Mourir lui donne une acuité qu'elle n'avait pas auparavant. Elle s'illumine de l'intérieur à mesure qu'elle prend conscience de certaines choses.
La beauté de cette histoire, c'est qu'elle soulève de véritables problématiques, elle nous pousse à réfléchir à notre propre vie, à nos rêves, nos aspirations et nos priorités. Comme le remarque si justement notre héroïne :
— Tu as conscience qu'elle va t'embêter toute la journée ? Tu ne préférerais pas rester seule ?
Je sais qu'elle attend une réponse positive. Pendant des années, ça a été le leitmotiv de la maisonnée : « Sam préfère rester seule. » « Tu viens dîner ? » « Je vais plutôt manger dans ma chambre. » « Où vas-tu ? » « J'ai envie d'être seule. » « Je peux venir ? » « Laisse-moi tranquille. » « Je t'interdis d'entrer dans ma chambre. » « Ne m'adresse pas la parole quand je suis au téléphone. » « Ne m'adresse pas la parole quand j'écoute de la musique. »
Seule, seule, seule...
La mort a tout changé – sans doute parce que c'est l'activité la plus solitaire qui soit.
Lauren Oliver a su transmettre beaucoup d’émotions dans son récit. C'est surtout dans la dernière centaine de pages, quand j'ai senti mes yeux s'embuer, que j'ai su qu'il s'agissait d'un livre pas comme les autres. Pas le genre d’histoire retentissante qui nous fait sauter au plafond, plutôt le genre où chaque nouvelle page ajoute un petit bouleversement supplémentaire, jusqu'à nous faire rendre les armes à la fin. Une fin qui était beaucoup trop abrupte à mon goût (j’ai dû la relire 3 fois pour être bien sûre d’avoir compris), même si je comprends le choix de l’auteur.
En résumé, Before I fall est une histoire qui a frôlé le coup de cœur. Elle a su m'apprivoiser, me titiller, m'agacer et me séduire. Lauren Oliver aborde des sujets complexes qui sauront parler à tous les adolescents d’aujourd’hui – et même aux plus grands, comme moi. Je ne regrette certainement pas d’avoir découvert ce roman bouleversant, et j’ai très envie de lire l’adaptation du roman sortie récemment !
|
INFORMATIONS SUPPLÉMENTAIRES