Condamnée à tort pour un meurtre qu'elle n'a pas commis, Clara se retrouve internée à l'hôpital Saint-Etienne, une prison psychiatrique dont on ne ressort pas. Dès son arrivée, on lui ôte tout ce qui fait sa personnalité : sa vie, ses affaires, son nom, sa liberté entière, à la place de laquelle on lui décerne un numéro. Mais #2432 n'est pas seule. Tout au fond d'elle, emprisonnée entre les murs de son esprit se dissimule un monstre, son autre moitié, Carla...
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Il y a déjà un ou deux ans, j'ai fait la connaissance via Skyrock de Jennifer Provins. Ouverte et passionnée, on a vite sympathisé et je me suis promis d'acheter Troubles un jour (en auto-édition). J'aime les oeuvres psychologiques, mais il est rare que j'en lise. Le livre de Jennifer a réussi tous les paris fixés car durant toute ma lecture, j'étais sur la corde raide et je retenais mon souffle !
L'histoire commence alors que Clara intègre un hôpital psychiatrique à l'aspect un peu (beaucoup) délabré. Considérée comme une meurtrière alors qu'elle est persuadée de n'avoir rien fait, Clara se voit privée de son identité. Elle n'a plus de nom, de prénom, d'effets personnels. Elle est rebaptisée #2432 et a interdiction de communiquer sur son passé avec les autres résidents. On la dépouille de tout, y compris de sa liberté d'agir.
Bon, personnellement, j'ai trouvé que cet hôpital avait plus des allures de prison qu'autre chose. Les gens ne sont pas là pour être stabilisés, mais bien enfermés, voire carrément maltraités.
Il faut aussi savoir que l'histoire de Clara se situe à une époque futuriste. Alors si la technologie est de pointe à l'extérieur, la mentalité des gens, elle, a fortement régressé. Mais des sujets tels que l'homosexualité, la contraception, sont habilement glissés dans l'histoire, pour rendre cette nouvelle époque parfaitement crédible. Cependant, si je dois faire une remarque négative ce sera ça : on entraperçoit juste ce nouvel aspect du XXIIème siècle. L'auteur ne fait que de brèves références à ce sujet, et j'aurais aimé connaître plus en détail sa vision du futur.
Bon, je continue mon histoire ! C'est au sein de son nouveau "foyer", que Clara va apprendre à vivre. Contre toute attente, elle fait des rencontres assez sympathiques, mais se retrouve rapidement talonnée par des personnes mal intentionnées.
Cependant, une personne a pour objectif de protéger Clara coûte que coûte. Cette personne l'a déjà fait et est prête à tuer pour arriver à ses fins. Il s'agit de Carla, sa moitié, la voix dans sa tête, son âme-soeur.
Peu à peu, on en apprend plus sur le passé de Clara, sur ce meurtre dont on l'accuse et dont elle ne se souvient pas. La transition entre les aspects dévoilés est rondement bien menée. On s'y croit presque, on voit presque les murs vétustes de cet hôpital, les visages névrosés des occupants...
Même si Troubles est un livre très court, il n'empêche qu'il est extrêmement bien construit. Je sais que certaines personnes l'ont trouvé trop succinct et pas suffisamment détaillé. Pour ma part, ça n'a pas été le cas. En amoureuse des détails, j'ai trouvé que ces 198 pages se suffisaient à elles-même. L'histoire est profonde, pleine de sensibilité et de réalisme. Pour avoir pu observer des schizophrènes en unité de psychiatrie, je peux vous dire que l'auteur a très bien cerné leur combat intérieur et ce, avec subtilité, sans en faire des caisses.
Il y a une certaine complexité dans la relation entre Clara et Carla. Elles sont comme des soeurs, passant de la complicité à la haine en un quart de seconde. Si je me suis attachée à Carla - la part d'ombre - c'est parce qu'à travers les yeux de Clara, elle gagnait en humanité. Elle représente tout ce que l'Homme réprime : la bestialité, la violence, le ressentiment, la colère... Mais à côté de ça, elle peut faire preuve d'un côté protecteur, proche de celui d'une mère.
La tension explose entre ces deux personnalités, à mesure que leur besoin de liberté s'exprime. Carla fait de plus en plus parler d'elle, commence à penser pour elle, au détriment de Clara. Et une nouvelle problématique se pose : comment vivre à deux dans un seul et même corps ? C'est à la fois malsain et déroutant, mais on en redemande !
Je déplore seulement que la relation entre Clara et Matt n'ait pas été plus exploitée. J'ai senti l'attachement qu'ils se portaient l'un à l'autre, mais je ne l'ai pas réellement compris.
Là où ça devient vraiment intéressant, c'est que l'on arrive dans cet hôpital en pensant y trouver de dangereux criminels, assoiffés de sang, prêts à se taper la tête contre les murs à la moindre crise. Il y a de ça, mais pas que. Ceux qui croisent le chemin de Clara ont aussi leur part de lumière, et d'un côté, ça nous prouve que personne n'est à l'abri d'une décompensation. Les actes sanguinaires ne font pas nécessairement de ces gens des monstres. Au contraire, ils peuvent se montrer compatissants, empathiques, généreux, contrairement aux véritables montres, ceux qui les enferment et les traitent comme des animaux.
L'auteur a une plume simple, mais juste. Elle décrit les ressentis de façon très réaliste et on est rapidement transporté dans son univers. On ne s'embarrasse pas de détails inutiles et on va droit au but. Puis Jennifer a su décrire avec brio l'ambiance un peu glauque et inquiétante de l'hôpital. De quoi faire froid dans le dos.
MA NOTE FINALE :
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