Toutes les femmes de ma famille sont des sorcières, et chacune possède un pouvoir particulier.
Ma grand-mère sait lire les émotions et apaiser les passions les plus intenses. Ma mère peut influer sur l'amour et la tendresse. Mon don à moi, c'est d'interpréter les rêves. Jamais je ne me suis trompée. Or, je viens de rêver que je me noyais dans mon propre sang. Et cela ne peut signifier qu'une seule chose. Quelqu'un va me tuer. |
La sorcière de Prince Island est un livre qui m’a tout de suite tapé dans l’oeil. D’abord, parce qu’il parlait de sorcières (et j’adore ça !), mais aussi pour cette première de couverture qui n’a pas cessé de me faire de l’oeil. J’ai craqué et le résumé, bien que bref, a immédiatement titillé ma curiosité. Malheureusement, ça n’a pas été le coup de coeur attendu et j’ai eu quelques difficultés à m’immerger totalement dans l’univers de Kendall Kulper.
Nous découvrons le quotidien d’Avery, adolescente vivant à Prince Island, une île de pêcheurs qui ne vit que de la capture des baleines. Petite, Avery vivait aux côtés de sa grand-mère dans une cabane. Cette dernière est connue pour ses grandes capacités de sorcière, aidant les pêcheurs dans leur travail au moyen de talismans à la conception obscure. Elle accueille également d’autres habitants et même des voyageurs, et lance des sortilèges moyennant finance. Avery a longtemps vécu de cette manière et a aussi un don : celui d’interpréter les rêves. Elle est prête à reprendre le flambeau lorsque le moment sera venu pour sa grand-mère de trépasser. Car les sorcières Roe héritent de cette place de génération en génération, et la jeune fille est fière d’en faire partie.
Seulement un jour, la mère d’Avery – jusqu’ici restée dans l’ombre – décide d’intervenir et d’arracher la jeune fille à sa grand-mère. Persuadée qu’elle mérite une vie loin de l’odeur des poissons et des sortilèges, la mère d’Avery l’affuble de belles toilettes et lui promet une vie splendide. Mais celle-ci ne veut rien de tout ça et ne demande qu’à devenir la nouvelle sorcière Roe. Elle est prête à tout pour y parvenir.
Une intrigue forte et bien pensée. J’ai aimé l’idée de base. Ce que j’ai moins apprécié en revanche, c’est tout ce qui s’imbrique autour. Si la trame en elle-même a un potentiel énorme, la globalité s’en trouve entachée par le caractère très particulier d’Avery. Au début, ça ne m’a pas immédiatement heurté, car je comprenais sa détresse et son sentiment injuste d’être retenue captive par sa propre mère. Mais à mesure que j’avançais dans ma lecture… brrrr j’avais vraiment envie de la secouer et de lui dire d’arrêter de se regarder le nombril ! Elle n’aime personne et ramène tout à elle. Systématiquement. L’attachement qu’elle porte à sa mère et ses enfants est proche du zéro, elle rembarre méchamment les seules personnes qui s’intéressent un peu à elle et à aucun moment elle ne fait preuve d’empathie. Lorsqu’elle fait la connaissance du jeune Taneh, elle s’en cogne complètement de lui faire du mal et se montre complaisante à la moindre occasion. Quand elle s’attache à quelqu’un, c’est uniquement lorsque cette personne est susceptible de lui apporter directement quelque chose (j’entends par là sa relation avec Tommy qu’elle finit par oublier très rapidement, alors qu’ils se connaissent depuis des années). En bref pour moi, Avery est une héroïne franchement détestable et c’est en grande partie à cause d’elle que je n’ai pas réussi à apprécier ma lecture comme il se doit. Heurement, le personnage de Taneh apporte une touche indéniable de douceur, ce qui vient compenser les sentiments négatifs qu’elle nous inspire.
Bien sûr, l’histoire ne comporte pas que des mauvais points. Ce qui m’a le plus intrigué, c’est l’ambiance qui se dégage de chaque scène. C’est tellement bien distillé qu’on a presque l’impression d’y être. L’atmosphère est noire, lourde, pesante. Attention à ne pas tomber dans ce travers, car ici, c’était tellement sombre que je finissais par trouver l’histoire froide. J’en suis venue à me demander comment Avery pouvait vouloir vieillir sur cette île humide qui embaume la baleine.
Malheureusement, si l’ambiance est déjà clairement établie, l’auteur s’éparpille un peu dans le récit et embraye parfois sur des détails qui, pour moi, sont accessoires. On finit rapidement par dévier de l’intrigue principale, au point de l’oublier et d’en occulter les enjeux. Un peu comme si l’auteur avait cherché à remplumer l’histoire au moyen d’éléments n’ayant aucun impact sur le déroulement des événements…
La fin a cependant retenu mon attention. Je ne m’y attendais pas et même si ce n’est pas la conclusion que j’espérais, elle est en accord avec l’atmosphère sombre qui règne tout au long de l’histoire. L’auteur n’a pas choisi une happy end, au contraire, elle a donné un tournant à ce livre assez inattendu qui en surprendra plus d’un.
Une plume jolie et bien tournée, cependant il y a trop de passages narratifs pour moi, ce qui casse un peu le rythme de l’histoire et fait parfois décrocher en plein milieu d’un paragraphe. L’imagination est là, mais un peu plus de peps n’aurait pas été de trop.
En résumé, c’est une déception pour moi. Peut-être en ai-je attendu trop. Quoi qu’il en soit c’est ma première déception chez Black Moon et c’est bien dommage. Si le fond de La sorcière de Prince Island a tout pour piquer l’intérêt, l’auteur a choisi d’aborder ça d’une façon qui ne m’a pas du tout convenu, avec un récit trop présent et des détails inutiles. J’ai eu des difficultés à m’attacher à Avery, même si j’ai beaucoup aimé le personnage de Taneh qui venait faire tampon avec cette animosité. Je salue tout de même l’atmosphère un peu dark qui nous prend aux tripes durant toute la lecture.
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