Souad à 17 ans, elle est amoureuse. Dans son village comme dans beaucoup d'autres, l'amour avant le mariage est synonyme de mort. " Déshonorée ", sa famille désigne son beau-frère pour exécuter la sentence.
Enfermée dans la chambre voisine, Souad a entendu la condamnation. Le lendemain, elle est en train de laver du linge dans la cour de sa maison. Son beau-frère approche, elle est terrifiée, il l'asperge d'essence, il craque une allumette, elle est brulée vive. Aux yeux de tous, cet homme est un héros. C'est ce que l'on appelle un « crime d'honneur ». Ce n'est en fait qu'un lâche assassinat. L'exécutant ne risque rien, il n'est presque jamais poursuivi, encore plus rarement condamné. Plus de cinq mille cas sont répertoriés chaque année dans le monde, bien |
d'autres ne sont jamais connus. Atrocement brûlée, Souad a été sauvée par miracle. Elle a décidé de parler pour toutes celles qui aujourd'hui risquent leur vie. Pour dire au monde la barbarie de cette pratique. Elle le fait au péril de sa vie car l'atteinte à « l'honneur » de sa famille est imprescriptible.
Brûlée vive est un livre tombé dans mes mains lorsque j’avais 16 ans environ. Il appartenait à ma mère et à l’époque je n’avais plus rien à lire, et je me suis dit… pourquoi pas ? Un témoignage qui a traversé les années, car aujourd’hui encore je me souviens à quel point cette histoire m’avait heurtée. Une relecture qui ne m’a pas laissée indifférente et qui pousse à se poser beaucoup de questions.
En Cisjordanie, dans beaucoup de villages reculés, les femmes ne sont pas traitées comme tout le monde. C’est là que Souad vit. Âgée de dix-sept ans, elle est habituée à un mode de vie des plus particuliers. Les jeunes filles comme elles ne sont pas considérées, voire maltraitées pour la plupart. Une vache ou une chèvre a plus de valeur qu’une femme et ces dernières n’ont pas l’autorisation de s’exprimer.
Mais Souad a l’habitude. Traitée comme une esclave par son père, elle vaque à ses corvées sans jamais se rebeller, tous comme ses soeurs. Il n’y a que son frère qui a le droit de sortir, de s’amuser et de s’épanouir. Les filles comme elle ne doivent pas quitter la maison seule et toujours regarder leurs pieds dès qu’elles sont à l’extérieur. Une vie qui lui paraît normale et méritée, elle qui baigne dans ce milieu depuis sa naissance.
Souad a un rêve. Celui d’échapper à la cruauté de son père – un homme violent et cruel – en se mariant. Mais la tradition veut que les aînées soient mariées en premier. Et la jeune fille attend avec impatience qu’un homme demande la main de sa soeur aînée pour que ce soit enfin son tour. Sa plus grande crainte est de finir vieille fille et d’être ainsi la risée du village (et accessoirement la honte de sa famille).
Un jour, elle apprend qu’un homme la convoite et attend son tour avant de lui demander sa main. Amoureuse et nourrie par l’envie de briser ses chaînes, Souad commet le péché ultime : elle tombe enceinte sans être mariée. Le père de l’enfant est un lâche et l’abandonne sans se retourner. Dans son pays, les crimes d’honneur sont tolérés, et pour laver leur honneur, ses parents décident de l’éliminer.
Comment rester stoïque face à une telle histoire ? Tout en sachant qu’il s’agit là d’un témoignage… L’histoire de Souad m’a fait passer par un grand nombre de sentiments. J’ai été envahie par une rage et une incompréhension inouïes. Une incompréhension parce que le mode de vie de ces gens est tellement caricatural… qu’on a du mal à imaginer qu’il ne s’agit pas là d’une fiction. Si le mal pouvait prendre un visage, je pense que ce serait celui de ces hommes qui se proclament tout puissants et qui condamnent avec véhémence le mode de vie des Occidentaux.
Le roman est scindé en deux parties. La première nous compte la vie de Souad avant la tentative d’assassinat. C’est sans doute la partie qui m’a le plus marquée, car on découvre un pays tellement engoncé dans ses traditions qu’il paraît être à des années-lumière du nôtre. On se retrouve rapidement bouleversé (voire écoeuré) par la vie que mènent ses pauvres femmes vivant sous la coupe de l’homme, qui n’ont droit à aucune éducation et qui sont interdites de vivre pour elles. On se demande comment une telle chose est possible, surtout ce qui s’ensuit pour la pauvre Souad, grièvement brûlée par son beau-frère.
La deuxième partie est plus centrée sur le combat mené par Jacqueline. Cette dernière croise la route de Souad, laissée pour morte dans l’indifférence du corps médical, dans une chambre d’hôpital. Travaillant pour l’association Terre des Hommes, elle va tout mettre en oeuvre pour sortir la jeune fille de cet endroit. Un combat difficile, fait de négociations et de persuasion, dans un monde où la femme n’est rien et où les conflits font tourner les rouages de la société. Après de longues parlementions, Jacqueline va arracher Souad à l’emprise de sa famille au Moyen-Orient, et ainsi gagner la Suisse où elle pourra bénéficier de soins médicaux.
En résumé c’est un roman prenant qui ne tourne pas autour du pot et va au fond des choses, sans détour. L’auteur nous livre son témoignage de façon directe et précise. Il m’est arrivé d’être profondément répugnée par ce que je lisais, car certaines scènes sont particulièrement déplaisantes. Brûlée vive a été une lecture poignante et je n’en suis pas ressortie indemne. |